Paroles de Le Coureur

Je courais sur la plage abritée des alizés,
Une course avec les vagues, juste un vieux compte à régler.
Pieds nus comme couraient mes ancêtres.
Un type avec un chronomètre. Oh j'ai bien vu derrière ses lunettes.
Je suis rentré au soir, quand les vagues ont renoncé.
Il était déjà tard mais les parents m'attendaient.
Y'avait l'homme bizarre à la table, ma mère une larme, un murmure,
Des dollars et leur signature.
J'ai pris le grand avion blanc du lundi
Qu'on regardait se perdre à l'infini.
J'suis arrivé dans le froid des villes
Chez les touristes et les automobiles,
Loin de mon ancienne vie.
On m'a touché, mesuré comme on fait d'un cheval.
J'ai couru sur un tapis, pissé dans un bocal,
Soufflé dans un masque de toutes mes forces, accéléré plein d'électrodes
Pour aller jusqu'où j'avais trop mal.
On m'a mis un numéro sur le dos.
Y'avait des gens qui criaient, des drapeaux.
On courait toujours en rond, des clous aux deux pieds pour écorcher la terre.
Je la caressais naguère.
J'ai appris à perdre, à gagner sur les autres et le temps,
A coups de révolver, de course et d'entraînement.
Les caresses étranges de la foule, les podiums
Et les coups de coude,
Les passions, le monde et l'argent. Etait-ce un mal, un bien ?
C'est ainsi.